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L'apéritif en nylon


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Nylon paparazzi (18)

 

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Prêts pour une nouvelle aventure dans les journaux d’époque qui parlent de nylon?

A l’évidence dès que le collant remplaça le bas, les articles de presse le mentionnant se font plus rares. Ce n’est pas qu’ils aient occupé la une avant, loin de là. On en faisait mention dans les publicités et les articles plus spécialement destinés aux lectrices. La presse quotidienne était plutôt orientée mâle, on mentionnait plus volontiers le dernier salon de l’automobile ou le fusil à trois coups pour les chasseurs. Ce n’était pas, à mon avis, la meilleure des idées. La femme, plus souvent reléguée au rôle de ménagère jusqu’à la fin des années 60, avait sans doute plus de temps de parcourir le journal son ménage une fois fini. Pendant que  la marmite à vapeur émettait son doux sifflement, promesses d’un dîner succulent, je la vois assez lire le journal. Ma mère le faisait et elle n’était pas la seule. Potentiellement la femme est plus compliquée, ouh. là n’allez pas y voir un Boss machiste et fier des poils de barbe qui poussent sur sa figure, celles qui me connaissent le savent bien. Mais non, mais non, quand je dis cela, je pense aux accessoires qui font partie de la panoplie du nécessaire féminin pour une femme qui accorde un tant soit peu d’attention à sa personne. Prenons comme exemple une femme en 1960. A part sa garde-robe standard, ce qui est usuel pour ne pas causer une émeute dans les rues, il y a des accessoires qui ne font pas partie de celle de l’homme. Je pense à la lingerie tout d’abord, un soutien-gorge, un porte-jarretelles, une gaine, une culotte, une combinaison, un jupon, assez courants à cette époque, et des bas. En comparaison pour l’homme, un slip et des chaussettes sont suffisants. Rien que le bas est un objet qui demande un renouvellement assez fréquent, il file, il se déchire, et puis admettons aussi que la qualité n’était pas toujours au top. Les autres accessoires ne sont pas non plus inusables. Je pense qu’un porte-jarretelles employé quotidiennement comme c’était le cas, devait marquer des signes de faiblesse au bout de 3 ou 4 mois. A côté de cela, il y a les produits de beauté, maquillage, soin de la peau, hygiène. Comme on le voit, et j’oublie volontairement ce qui peut servir à l’entretien du ménage, la femme est involontairement plus dépensière que son pendant masculin. Elle doit faire face à des achats qui font d’elle la ménagère et la belle qui essaie de plaire à son mari. Je me suis toujours étonné du manque de place qui lui est accordé dans les journaux, sans oublier le côté éditorial, l’affaire est surtout entre les mains masculines. On les tolère juste pour une rubrique mode, un recette de cuisine, très rarement elle commente les faits politiques. Si quelques hebdomadaires ou mensuels lui sont plus particulièrement dédiés, là encore le haut de la hiérarchie est rarement occupé par une femme.  Les chose ont changé depuis, sans que l’on arrive vraiment à une pleine reconnaissance de la vision féminine de la société, qui n’est pas forcément pire que la masculine, bien que certains aient encore de la peine à l’admettre. La vision réductrice de la femme dépensière a encore des beaux jours devant elle. J’ai profité de glisser un mot petit intermède sociologie dans cet article, tant il est visible quand on consulte les vieux journaux.

Nous disions donc que le mot bas avait peu à peu disparu de la presse pour des raisons de changement d’habitudes. Pourtant, et cela m’a fait bien marrer, j’ai trouvé sa mention assez fréquente dans des articles relatifs à des faits divers, hold-up, braquages, attaques à main armée et autres filouteries. Le bas est devenu un accessoire qui n’a plus rien de glamour, mais sert à cacher le visage. A partir de là, la situation peut prendre une tournure humoristique. On imagine les fabricants de bas espérant une hausse des attaques à visage masqué pour vendre la marchandise. Ou encore le flingue vendu avec cartouches et bas, le kit du parfait malfrat. Le perfectionniste qui met un bas sur son visage avec un porte-jarretelles autour du cou pour qu’il tienne en place. Les jumeaux qui adoptent le collant. Il faut quand même se méfier, dans notre société qui veut tout réglementer, l’interdiction de la fabrication des bas, accessoire prisé par les délinquants. Alors je lance un appel aux intéressés, changez vos habitudes, vous ne voudriez quand même que l’on interdise une si belle chose.

Bon assez ri, soyons sérieux. Un point qui n’a pas échappé à la presse, c’est le cinquantenaire de l’invention du nylon, en 1988. Bien qu’un commentateur se plante et parle de 40 ans. Quelques articles commémoratifs retracent son avènement, tout en vous rappelant que vous pouvez cliquer sur les images pour une meilleure lecture.

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Les plus anciens se rappellent sans doute un fait divers qui avait secoué l’Autriche en 1977. L’enlèvement d’un industriel, âgé de 74 ans, libéré contre rançon quatre jours plus tard. Cet industriel, Walter  Michael Palmers,  était une sorte de roi du bas nylon. Sa descendance existe toujours sous le nom de Palmers et est encore aujourd’hui un grand groupe qui domine les marchés de l’Est et l’Allemagne. Ici ils sont assez peu connus, toutefois ce sont eux qui ont racheté Lejaby en 2008, avec toutes les péripéties que l’on connaît ensuite.29  050413-4

J’en profite pour signaler concernant le même histoire, comment les erreurs peuvent parfois entacher la vérité historique. Lors du rachat de Lejaby, il en est fait mention dans la presse française, le Figaro, qui parle aussi à titre de rappel de l’enlèvement. Je cite:

Outre ses enseignes omniprésentes et sans guère de concurrence dans les villes autrichiennes et allemandes, la firme Palmers doit également sa notoriété à un fait divers survenu en 1977 : l’enlèvement de son PDG, Walter Michael Palmers, par un groupuscule proche de la Fraction armée rouge. La victime fut libérée après cent jours de détention, contre la somme astronomique de 31 millions de schillings (environ 2 millions d’euros), et ses ravisseurs arrêtés peu après. Un film documentaire* consacré à cette histoire est sorti en 2007 en Autriche.

Comme vous le remarquez, la durée de l’enlèvement de 4 jours passe à 100 jours, quant à la somme de la rançon, à ma connaissance, elle n’a jamais été précisément connue. Le premier article est seul proche de la vérité.

En 1974, il est sûr que le bas nylon n’était plus très coté en bourse. Témoin cette annonce commerciale concernant une liquidation. N’est-ce pas mesdames que vous rêvez d’acheter vos bas aujourd’hui pour ce prix là?

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1966 – Il n’y a pas que des clopes ou des bonbons dans les distributeurs automatiques, il y a aussi des bas. Voici ce qu’en dit la presse de l’époque.

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1965 – Les enquêtes consommateurs existent déjà, mais plutôt que de comparer les méfaits de l’huile de palme avec les bienfaits de l’huile d’olive, on passe les bas à la loupe. Dommage qu’ils n’aillent pas jusqu’à mentionner le nom des marques. Cela doit être un secret militaire en Suisse, pays d’origine de l’enquête.

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Abandonnons les journaux pour ouvrir les pages d’un livre et en extraire une citation:

« La ligne du slip et celle du porte-jarretelles ressortaient nettement. Quant à sa poitrine. à sa magnifique poitrine, rien en la tenait »

Elle pourrait être issue d’un San-Antonio. Mais non il s’agit d’un de nos meilleurs écrivains, dépositaire du mot « rififi, tantôt gouailleur, tantôt profond, il est aussi l’un des grands « fournisseurs » pour le cinéma où le parler populaire est à l’honneur. Il s’agit bien sur de Auguste le Breton, et de son excellent roman « Les Tricards », paru en 1958. Pour ceux qui ne savent pas ce que c’est un tricard, eh bien il s’agit d’un condamné qui a une interdiction de séjour dans certains départements, la Seine notamment. Ils étaient obligés de survivre dans des endroits où les combines sont moins faciles. L’histoire se passe dans une entreprise qui occupe justement ces rejetés, en les payant au lance-pierre, avec toutes les aléas qu’une cohabitation de ce genre peut amener. Mais je me mets dans la peau de l’auteur, car il a bien dû imaginer la scène. C’est juste glissé comme ça dans l’histoire, qui n’a que de brèves allusions à la sexualité.

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A bientôt pour de nouvelles exploration d’archives


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Nylon Paparazzi (17)

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Les journaux nous offrent toujours des possibilités étonnantes pour la recherche de documents. Pour ma part j’ai reconstitué une partie de mon enfance en recherchant les événements lointains qui m’avaient marqués alors. Cela fait partie de ma vie personnelle et n’intéresse que moi. Toujours dans mon souci de reconstituer l’histoire du nylon et de la lingerie, j’ai continué mes fouilles. Ce qui attire le plus les hommes dans la lingerie, c’est bien le porte-jarretelles. En fait, il désigne par raccourci toute pièce de lingerie destinée à tenir les bas. Il est, si on veut, un nom générique. Pour plus de vérité historique, les premiers articles du genre furent le corset et la gaine. Mais le nom du porte-jarretelles a bien été créé quelque part et par quelqu’un. L’histoire n’a pas retenu son nom, mais on peut imaginer qu’il est entré dans le vocabulaire par une sorte d’effet de marketing, la création d’une idée de libération. A titre et goût personnel, ce n’est qu’à partir de l’invention du bas nylon que la jambe commence à me paraître vraiment sexy. C’est surtout la transparence du bas qui lui ajoute ce côté charmant. Pendant de siècles apercevoir la cheville d’une dame était un spectacle rêvé. Puis la silhouette de la jambe a commencé par devenir visible, enfin la peau  cachée sous l’épaisse  soie ou la rayonne s’est quelque peu révélée au regard. Dans l’imagination de la femme, cela peut ressembler à une sorte de libération, on ose montrer ses jambes, du moins suggérer par effet visible que la jambe n’est pas couverte de varices ou de piqûres de moustiques. Mais revenons au porte-jarretelles. Comme je le disais, il est un pas vers une certaine libération qui a plus à voir avec le confort que le reste. On peut admettre que la lingerie au tournant du 20ème siècle supporte assez bien l’appellation d’artillerie lourde. Si on ne peut lui dénier un certain charme que bien des spécialistes d’aujourd’hui apprécieront et par définition ceux qui le vécurent en direct, il reste quand même que la femme souffre pour être belle. La cérémonie de l’habillage ou le déshabillage représente un temps fort de la journée. Encore faut-il que la maison ne soit pas en feu, sinon il faut choisir entre le rescapée impudique ou la victime décente. Dans un sorte de souci de simplification, le porte-jarretelles est devenu le mot qui soulage et qui fait gagner du temps. On a pas non plus passé du vêtement qui enrobe la taille à la simple ficelle comme ce qui s’est fait plus tard. On peut carrément dire que cela s’est fait progressivement, la bande entourant le ventre a diminué centimètre par centimètre. A la grande différence de la gaine qui descend assez bas, la manque à gagner est compensé par la longueur des élastiques qui peuvent aller à la rencontre du bas. Enfin vous connaissez le visuel aussi bien que moi.

Alors je suis parti dans les archives de journaux pour voir quand apparaissait le mot pour la première fois. La première mention est 1923 dans le cadre d’une publicité pour un magasin de lingerie. Mais partons en exploration à travers les images et vous verrez, j’ai fait une surprenante découverte au cours de mes recherches. Et comment un porte-jarretelles sera cité lors d’un procès.

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Voilà la pub de 1923, comme vous voyez le mot est encore bien entouré de corsets, pas encore mort celui-là.

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La même année, remarquez la « gueule » du soutien-gorge au milieu

25 041213-6Un saut dans le temps, remarquez la diversité du vocabulaire employé. Ici, on parle de semaine suisse, car la fabrication de ces articles est faite en Suisse, pays assez réputé dans la fabrication de lingerie. La marque Viso à d’ailleurs un très beau logo.

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25 041213-7Une première représentation de ce qui peut suggérer un porte-jarretelles en 1937, bien que cet article manque encore d’allègement.

25 041213-8La guerre est finie, les bas nylons sont là. Dans un vocabulaire toujours diversifié, le corset voisine le serre-hanches et le porte-jarretelles

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Enfin un porte-jarretelles qui a tout le charme des années 50. Il est en quelque sorte en vedette, la pub ne parle pas d’autre chose. Messieurs affolez-vous!

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Un article sur la mode qui parle lingerie

25 041213-2Deux ans plus tard, toujours les mêmes recettes, le messieurs sont encore plus affolés

La surprise

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Eh oui nous sommes en 1952, un redoutable adversaire pointe, le bas qui tient tout seul est annoncé dans les nouveautés. Il lui faudra encore une bonne trentaine d’années pour qu’il passe en vedette. On peut rigoler de l’éclairage donné sur la publicité « plus besoin de porte-jarretelles ». Invention américaine il est dit. Dans un optique bien ricaine, j’imagine que la prime de fidélité offerte à l’achat de 10 paires était un flingue pour dégommer le rieurs quand la femme perdait un bas dans la rue.

L’affaire Montesi

Dans les années 50, la France se passionna pour « L’affaire Dominici ».  Même le fameux cinéaste Orson Welles y alla de son documentaire. Bien des années après on ne sait toujours pas ce qui s’est passé réellement. En Italie, c’est une autre affaire qui passionna les foules. En avril 1953, on trouva le corps de Wilma Montesi, une jeune fille de 21 ans, sur une plage près de Rome. L’enquête conclut à une mort accidentelle. L’affaire tourna au scandale quand la presse mit son grain de sel et  douta des conclusions de l’enquête. Elle affirma que des personnages en vue, notamment politiques, seraient impliqués dans la mort de la jeune fille.  Les suites de l’affaire, les arrestations, le procès, eurent un retentissement bien au dehors des frontières italiennes, assez pour que les quotidiens francophone en fassent fidèlement l’écho. Voici trouvé dans un de ces quotidiens, la reproduction du dialogue entre un substitut et un des accusés côté police. C’est sans doute une des rares fois où la disparition d’un porte-jarretelles jette le trouble dans un procès. Le tout se termina par un match nul, mais bien des doutes entourent encore la vérité sur cette affaire. 

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