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L'apéritif en nylon


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Des dessous pour un siècle (4)

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On pourrait surnommer ce début de siècle comme années folles. Si c’est à peine une exagération, il n’en reste pas moins que le niveau de vie est nettement plus enviable que 20 ou 30 ans auparavant. La condition  ouvrière n’est de loin pas une place assurée au paradis, mais sous l’impulsion des partis de gauche de plus en plus présents et revendicateurs sur l’échiquier politique, les conditions s’améliorent sensiblement. On peut trouver du travail, de plus la libre entreprise permet à certains de se lancer dans des métiers qui n’existaient pas, comme garagiste ou vendeur d’assurances.

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La mode bénéficie par la tranche d’un pouvoir d’achat amélioré. On peut jouer les coquettes à moindre frais, le demande n’en est que plus significative. La chose le plus visible dans la mode, c’est sa facilité de changement. On peut dire ironiquement d’une personne au caractère instable qu’elle change de culotte comme de chemise, en mode c’est une réalité. Les modes qui pouvaient durer le temps d’une favorite chez les rois de France, c’est à dire plusieurs années, se voient ramenées à une saison. On change d’habits quand on change de saison. Ce n’est pas vraiment un nouveauté propre à l’époque, mais maintenant on en parle à travers les journaux et éventuellement la radio.19 013015-4

Les sous-vêtements, plus discrets, subissent l’influence de la mode des saisons. On ne vas pas mettre une bonne vieille culotte en laine quand c’est l’été. La différence maintenant, c’est que l’on a plus ou moins les moyens financiers de faire le changement et de se coller plus ou moins à la mode. Nous sommes vers 1910, le bilan de ce début de siècle peut se résumer ainsi:

On assiste à une révolution vestimentaire très pacifique, mais qui lancera la base pour les générations futures. Le corset, encore très présent, cède la pas vers une lingerie plus légère. On lui trouve, après presque des siècles de domination, plus de défauts que de qualités. C’est aussi l’apparition d’une lingerie qui adopte une dimension de plus, le visuel. Même si elle s’affiche peu en public, elle permet dans l’intimité d’afficher une certaine coquinerie. Le bas, avec son accessoire de maintien qui deviendra la norme pendant des dizaines d’années, la jarretelle, commence à se conjuguer dans d’autres matières que la soie. Le soutien-gorge se fait de plus en plus présent, surtout chez celles qui ne portent plus de corset. Nous assistons également aux balbutiements de ce qui va devenir une tradition, la jarretière de la mariée. La femme des sociétés occidentales assume les prémices de sa libération. Bien plus qu’avant, elle devient une consommatrice de mode, elle peut assumer en plus ou moins grande partie son indépendance financière, surtout si elle travaille. L’homme est moins sollicité par les changements, mais il met aussi une partie de ses accessoires au rancart, le chemise et le bonnet de nuit sont remplacés par le pyjama. Pour l’instant, le fixe-chaussettes est encore indétrônable, la chaussette n’est pas encore élastique. 

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Ce semblant de légèreté de vivre ne va pas durer longtemps, les nuages s’amoncellent à l’horizon, mais personne ne veut vraiment les regarder. Au niveau de la mode, pour attirer la consommatrice, on redouble d’ingéniosité. Sa silhouette qui devient de plus en plus visible, cessant d’être cachée sous des tonnes d’habits, doit paraître parfaite. La minceur est de mise, pour celles qui ont renoncé au corset, il faut ruser. Pour la poitrine c’est le contraire, plus elle est conquérante et ferme, plus elle s’affiche fièrement. Mais que faire si on est grosse avec une petite poitrine. Le docteur Doxey et son célèbre élixir qui rencontra Lucky Luke dans une de ses aventures n’est pas mort. Les charlatans de tous poils, cachés souvent dans des laboratoires pharmaceutiques encore un peu préhistoriques, mettent au point toutes sortes de pilules, potions et produits miracles, censés soigner la femme là où elle a mal surtout moralement. Ces prodiges de tromperie trouveront belle clientèle. Si la poitrine ne grossit pas, le portefeuille des fabricants, lui, gonfle plus visiblement. Ces publicités aguicheuses auront la vie dure, on les trouve encore aujourd’hui.

Quelques unes de ces fameuses publicités

19 013015-519 013015-319 013015-2De l’humour, la jupe avec limitation de vitesse

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La mode, qu’elle soit vestimentaire ou autre, commence d’être un phénomène de société. Avec les médias naissants on sacre les gloires d’alors. Maurice Chevalier devient un emblème national. Il sera aussi un des premiers chanteurs à s’exporter en Amérique. Sa copine Mistinguett sera aussi une gloire dans le domaine du music-hall, du théâtre, de la chanson. C’est aussi dans ce creuset que l’on trouvera les vedettes en devenir que seront plus tard Gabin, Fernandel, Jouvet. Plus matériellement, il ne manque qu’une chose pour parfaire sa tenue, le parfum. Si ce n’est pas une invention nouvelle, on se réfère de plus en plus aux marques, les affiches publicitaires sont là pour le rappeler. Une invention plutôt technique fera fureur, la fermeture Eclair. Popularisée en 1913, par la société du même nom, il s’agit à l’origine d’une invention américaine que l’on perfectionna.

Mais voici que l’on part à la guerre en chantant…

Quelques dates

1910 – Un ligue contra la déformation de la taille par le corset est fondée. Le mot chemisier entre dans les moeurs, c’est un détournement de la chemise de monsieur.

1911 – Hollywood lance ses premières starlettes, on leur invente une biographie pas possible, mais on est encore loin de les voir défiler en maillot de bain. On remarque pour la première fois sur une photographie une femme qui porte ce que l’on pourrait appeler une jupe-culotte.

1912 – Premier défilé de mode sans corsets.

1913 – Jeanne Paquin est la première couturière à recevoir la Légion d’honneur

19 013015-1Jeanne Paquin

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19 013015-8A suivre